16/01/2019

CELLES QUI ATTENDENT By FATOU DIOME


Je me régale bien en ce début d’année. Par pure coïncidence, après Tounghan de Mahoua S. Bakayoko, ma deuxième lecture de l’année traite encore d’immigration clandestine. Il s’agit de « Celles qui attendent » de Fatou Diome.

Quel délice ! C’est le premier livre de Fatou Diome que je lis et sincèrement, je l’ai adoré. 
Je suis certain qu’il fera partie des livres qui m’auront marqué en cette année tellement j’ai été touché par le style de l’auteur et les thèmes qu’elle aborde. Je n’ai jamais lu une écriture aussi propre, concise et exquise. Riche en proverbes et en images, le texte de
Fatou Diome dans « Celles qui attendent » facilite la compréhension de la pensée de l’auteur ainsi que celles des personnages et pousse le lecteur à la réflexion.

Comme je le disais tantôt, dans ce roman, il est question d’immigration clandestine avec en fond, les problèmes qu’engendre la polygamie, le mariage forcé et la jalousie.

De quoi s'agit-il?

Dans un village de pécheurs en banlieue Dakaroise, la vie de Bougnan et Arame ressemble à celle de toutes ces mamans qui luttent pour faire vivre leur foyer et soutenir leurs enfants quand les maris ne sont plus en mesure de jouer leur rôle de chef. Et lorsque, triturées par la misère, et espérant une vie meilleure, ces femmes décident de sortir de l’état d’indigence qui les caractérise, le choix est vite fait : pousser leurs enfants, Issa et Lamine, à l’aventure européenne. Douteuse au départ à cause des risques liés à cette entreprise de voyage dans un monde lointain et inconnu, Arame finira par se laisser convaincre par sa meilleure amie Bougnan. Leurs progénitures ne leurs cachant pas non plus leurs secrets et brûlants désirs de se lancer dans la traversée de l’atlantique comme d’autres, pour une hypothétique vie dorée, elles n’hésiteront pas à tout mettre en œuvre pour réussir le pharaonique projet. Ce faisant, Bougnan et Arame étaient loin de s’imaginer qu’elles écrivaient ainsi les lignes de leurs tristes, douloureuses et illusoires histoires.

Même si Issa et Lamine ont bénéficié de la clémence divine pour être secourus par les garde-côtes Espagnols, leur vie en Europe ne sera pas l’Eldorado dont ils s’étaient toujours nourrit l’esprit avant leur voyage. D'ailleurs, leurs chemins sinueux faits de hauts et de bas en Europe, finiront par les séparer, ouvrant à chacun une perspective de vie et de vue différente. On ne revient pas toujours comme on part. Issa et Lamine ont traversé l’atlantique sur la même pirogue pour rejoindre l’Espagne ; ils ne reviendront pas de la même manière sur la terre qui les a vu naître.

A côté de Arame et Bougnan, il y a aussi Coumba et Daba, deux jeunes femmes piégées par leurs amours de jeunesse. Alors que la première, Coumba, aura eu le bref privilège de partager avec son homme, la chambre de ce dernier avant qu'il ne parte pour l’aventure; la deuxième, marié « par procuration », ne connaîtra les nuits torrides dont se glorifie toute jeune épouse à la poitrine bombée, que dans son imagination. Liées par l’amitié de leurs belles-mères, Coumba et Daba expérimenteront des infortunes différentes. A travers la vie de ces deux jeunes femmes, l’auteur décrit bien les plaisirs inassouvis et les douleurs inavoués des femmes attendant leurs époux partis à l’aventure. Ses amours absents et souffre-douleurs qui, ayant rempli le cœur des jeunes pucelles, font la guerre aux bonnes meurs. Coumba et Daba, dans l’attente du retour de leurs biens aimés, passeront des nuits blanchies par un espoir sombre.

Qu'ai je pu retenir de ce roman?

Dans ce livre, Fatou Diome traduit très bien l’imperceptible vide que laissent tous ces jeunes vaillants africains qui partent à la recherche d'un soit disant bonheur en laissant leurs familles, quelquefois complices, dans une douleur silencieuse. Encore si ce n’était que la famille qui en souffrait; la société elle aussi en pâtit. Son texte est non seulement une mise en garde destinée aux futurs candidats à l’immigration clandestine ; mais aussi, une invitation à une prise de conscience de la jeunesse africaine qui croit toujours que l’herbe est plus verte chez le voisin sans oublier d'interpeller les dirigeants sur les questions de politiques africaines.  

J’ai aimé lire « Celles qui attendent » de Fatou Diome et je recommande fortement ce roman.

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