Le livre dont je m’en vais vous
parler a été acheté en librairie par-terre aux abords du petit marché de
Yopougon Niangon Nord, à Abidjan en Côte d’ivoire. Chaque phrase et chaque
chapitre de ce livre sont plaisirs et délices. Fascinant, il propulse au
septième ciel littéraire lorsqu'on le parcourt. Mais attention,
pas d'abscondité. Ce n’est pas le thème abordé par l’auteur qui sous-tendcette
jouissance littéraire qui me met en transe mais plutôt l’esthétique stylistique
de l’auteur.
Non ! Je n’exagère pas s’il
vous plait. ''Dans le lit des rois'', car c’est de ce livre qu’il est question,
m’a fait découvrir son auteure, Juliette Benzoni. Une romancière qui a le bien
dire et le bien écrire. Avec une aisance scripturale et lyrique, cette
historienne que je ne connaissais pas avant d’avoir lu ce livre, donne de la
saveur et de la valeur à la langue de Molière. Je n’ai donc pas été
surpris
d’apprendre, après une recherche rapide sur Google, que sa plume a généré plus
d’une soixantaine de romans.
La qualité littéraire de cette
œuvre dénichée accidentellement dans les alcôves poussiéreuses est la preuve
que bien de trésors sont enfuis dans les librairies par-terre.
Bref, arrêtons-nous là pour ne
pas trop en faire au sujet de l’auteure. Twitter en a déjà eu pour son compte.
Roman, récit ou recueil de nouvelles ?
"Dans le lit des rois" est
une compilation de textes indépendants les uns des autres rendant, à
l’occasion, la lecture moins contraignante et plus aisée. On y distingue 2
parties essentielles. La première partie relate les noces de certains dieux
(Zeus, Apollon, etc.). Cette partie m’a moins accroché car je l’ai trouvée
assez abstraite. La seconde partie, qui m’a le plus fait effet, dévoile les
amours et les noces de célèbres rois européens (Louis XV, Auguste, Charles
etc.).
Dans sa forme, même si ce livre
est classé dans la catégorie des « Nouvelles », personnellement, je
n’ai pas perçu, dans ces textes indépendants, la structure standard d’une
nouvelle telle qu’on nous l’a apprise. Je dirais donc, pour ma part, que ce livre
est un recueil de textes historiques.
Alors de quoi s’agit-il ?
Dans ce livre, Juliette Benzoni
nous replonge dans l’Europe entre le 10ème et le 18ème
siècle. Elle raconte le déroulement des nuits de noces des rois et des princes.
Loin d’être un livre érotique, ''Dans le lit des rois'' met au grand jour les
contours longtemps tenus secrets des mariages des souverains que l’occident, et
plus particulièrement, la France aura connus.
Ces unions homériques étaient mues
par des raisons non moins anodines qu’amoureuses. Si ce n’était pour nouer une
alliance de non-agression ou un pacte militaire, c’était pour une
reconnaissance politique. Dans tous les cas, ces mariages étaient une recette
pour étendre ou, tout au moins, maintenir son hégémonie.
Par ailleurs, dans le contexte de
l’époque, les préposés au mariage ne se rencontraient pour la première fois que
le jour des noces. De la sorte, une grande appréhension régnait sur les cérémonies lorsque les conjoints devraient se voir, se parler et exprimer leurs
sentiments. Allez-y donc imaginer toutes les réactions improbables
lorsque venait le moment de se mettre en tenu d’Adam et Ève en face de l’âme sœur
inconnue en vue de consommer le mariage.
Des nuits de résignation aux
nuits dramatiques en passant par les nuits enthousiastes pour les plus amoureux,
Juliette Benzoni nous mène au cœur des nuits de noces des têtes couronnées.
Au delà du style
Happé par le style de l’auteure,
je me suis délecté de chaque histoire avec beaucoup d’appétit. Toutefois, mon
indifférence n’a pas été muette devant certains aspects qu’il me semble
judicieux de rapporter ici. Il s’agit de :
§
L'âge des époux
On aurait parlé d’attentat à la
pudeur ou de détournement de mineur si ces mariages se déroulaient à notre
époque. En effet, j’ai été choqué de découvrir plusieurs cas de mariage dont les
futures épouses convolaient en juste noce dès leur nubilité. Il suffisait qu’elle
voie ses lunes pour qu’elle fût apte au mariage. Surtout lorsqu'elle était d’une
de ses rares beautés. Certains époux aussi s’engageaient dans l’union sacrée alors
qu’ils ne savaient même rien du sexe opposé. C’est le cas de Robert qui, à 15
ans, sera engagé dans le mariage par son père Hugues Capet Duc de Neustrie, afin
de conserver sa dynastie. Et le mariage sera célébrer dans le seizième
printemps du jeune garçon. Je dis bien seizième printemps, loin de la majorité.
§
La dote du mariage
Comme si cela ne suffisait pas,
voici une autre pratique impensable qui me subjugua. Le paiement de la dote
incombait à la future mariée et non au marié. Me croiriez-vous ? Je ne
pouvais pas m’imaginer que cela ait existé un jour chez nos ancêtres les gaulois. En tout
cas, sous ces cieux miens, cela semble impensable.
§
Le processus de mariage
Que dire ici ? L’homme ou la
femme découvrait l’autre à travers le portrait physique ou verbal que lui faisait
un proche (parent ou collaborateur) de sa future conjointe ou son futur
conjoint. Le moment venu, le souverain envoyait en mission un collaborateur ou un
proche parent pour célébrer le mariage par procuration, un vrai mariage en
l’absence du vrai époux. Ensuite, l’émissaire conduisait la femme avec toute sa
délégation auprès de son futur époux. Les retrouvailles des 2 familles ou
délégations étaient festives; et la tombée de la nuit devrait ensuite permettre
aux époux de consommer le mariage avant la bénédiction nuptiale par l’église le
lendemain. Chacun pourra en juger mais il est clair que ce processus n’était
pas toujours fait pour arranger les choses, surtout dans les conditions où
l’un des conjoints se trouverait mal à l'aise devant l'autre. Voilà qui fait l’intrigue
de ce livre.
§
L'instrumentalisation de la femme
Elles servaient à
satisfaire les désirs charnels des souverains, à perpétuer leur dynastie et
surtout à décorer leur palais. La femme, dans le contexte que présente l’auteure,
n’avait de valeur que par sa beauté et sa fécondité. Elle était parée pour être
une égérie royale. Et j'ai trouvé cela dommageable.
Vous l’aurez remarqué, toutes ces
pratiques pour le moins incongrues sous nos cieux, constituaient la norme d’une
époque oubliée. Grâce à sa plume savoureuse, Juliette Benzoni réveille la
mémoire de l’histoire, la mémoire des hommes et la mémoire des dieux, en nous
révélant irrévélable.
Pour une fois, je ne vous
conseillerai pas la lecture de ce livre en particulier. Non ! Je vous conseille plutôt
de lire du Juliette Benzoni. Cependant, si le thème abordé dans mon compte rendu vous
parle, et que vous voulez en apprendre davantage, n’hésitez pas à demander "Dans le lit des rois" à votre libraire ; vous en serez doublement
satisfait, comme moi.
Pour ma part, je n'ai pas hésité à m'offrir un deuxième livre de l'auteure, acheté cette fois-ci dans une librairie normale et moderne. Je vous en parlerai certainement dans les prochaines semaines.
A bientôt !
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