12/11/2012

PASTEUR YOBO

L’église des Peuples Secourus par Dieu était toujours bondée de monde à la recherche du bonheur. Les miracles que Dieu faisait au travers du Pasteur de cette église étaient concrets. Et systématiques. On dit que Dieu est lent à agir et Satan est rapide. Mais avec le Pasteur Yobo c’était tout le contraire. C’est Satan qui était lent. Dieu agissait bien et vite. La puissance de Dieu avait tout son sens chez le Pst Yobo.
 
Pour galvaniser ses fidèles le pasteur Yobo avait l’habitude d’utiliser ce verset particulier de la Bible : « Mon père travaille jusqu’à présent. Moi aussi, je travaille». 
Et le pasteur de commenter :
-  Cette phrase est-elle au futur ?
La foule répondait en cœur en criant « NON ». « Au présent ! Au présent ! ». Alors le Pasteur de reprendre, « Si c’est au présent, Pourquoi attendre encore ? Jésus opère les miracles maintenant alors RE-CE-VEZ VOTRE MIRACLE». Et des cris surgissaient dans la foule en liesse.
Même si certains de ses compères pasteurs doutaient de son charisme, cela n’anéantissait en rien sa renommée. Il disait toujours que ceux qui ne croient pas aujourd'hui, croiront un jour en la puissance de Dieu.

Dans le quartier où il exerçait, Pst Yobo était l’espoir de tous les habitants. Son église construite en bois ne désemplissait pas. Les gens venaient des quartiers huppés de la capitale pour y prier avec lui. Parmi ceux-là figuraient des familles que Pst Yobo avait aidé à sortir du trou.
Plusieurs personnes vivaient dans ce quartier mais avec l’appui des prières ferventes de Pst Yobo, leurs statuts avaient changé. Ces personnes étaient maintenant parmi les plus prospères et habitaient les quartiers chics. Pour lui être reconnaissant et rendre témoignage des bienfaits de Dieu, ces familles bénies à travers le ministère du Pasteur Yobo, effectuaient des dizaines voire des centaines de kilomètres pour venir à l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu. 
Sous la pluie comme sous les vents, les fidèles du Pst Yobo ne manquaient sous aucun prétexte un programme de l’église. 

Un jour, le Pasteur Yobo réunit les membres influents de son église et les informa que Dieu lui avait parlé pendant son sommeil. Dieu lui avait dit qu'il était maintenant temps de changer de lieu de culte. Le temple en bois dans ce quartier précaire même s’il était grand s’avérait maintenant exiguë  Il leur fallait un temple plus grand, dans un quartier plus honorable où ils pouvaient rendre gloire à Dieu. Tous approuvèrent l’idée.
Une offrande fut organisée le dimanche suivant. Ce jour là, le culte dura plus que d’ordinaire. Le résultat était imprévisible. Les fonds mobilisés pour cette matinée de culte s’élevaient à quinze millions cinq cent quarante un mille francs CFA en espèce. Ceux qui n’avaient pas pu donner leur participation séance tenante, promirent d'honorer leur engagement dès le prochain service. Le dimanche suivant, ils collectèrent quatre millions deux cent trente mille francs. Avec la somme de dix neuf million sept cent soixante dix mille francs CFA, le pasteur Yobo pouvait aisément construire un nouveau temple sur un grand terrain. Ce qui arriva. Un mois plus tard, Pst Yobo officiait dans un temple plus grand et construit en dur dans le quartier Génito. Des brasseurs d’air y avaient été installés pour rafraîchir les fidèles.

Deux fois par semaine, le Pst Yobo recevait des centaines de personnes qui sollicitaient l’intervention de Dieu dans leur vie. Parmi ces visiteurs figuraient des jeunes filles à la recherche d’un mari ; des femmes dont le foyer était menacé par le divorce; des personnes à la recherche d’emploi ; des hommes d’affaires souhaitant voir prospérer leurs affaires. Il y a avait aussi de nombreux demandeurs de visa pour l'Europe. Après les séances avec le pasteur Yobo, certains repartaient déçus et ne remettaient plus les pieds à l’église parce que n’ayant pas été exaucés. Plusieurs par contre, voyaient leurs sujets de prière exaucés. Ils étaient satisfaits et s’ajoutaient à la communauté de l’Eglise des peuples Secourus par Dieu à l'image de M Yapi Yapo.
M Yapi vint un jour trouver Pst Yobo tout désespéré. Il avait prié et jeûné pendant des jours, des semaines et des mois dans l’espoir d’être réintégré dans la société de laquelle il avait été injustement remercié. Après plusieurs mois de prière dans plusieurs églises du pays, M Yapi n’avait pas eu gain de cause. Dans le désespoir, il entendit parler de l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu et de son Pasteur. Il rencontra le pasteur Yobo un de ces jours de réception et lui exposa son problème. Le Pasteur lui dit de faire une offrande au Seigneur. Sur place, il vida ses poches et donna au Seigneur tout ce qu’il avait dans son porte monnaie. Par la foi, le Pasteur Yobo lui demanda seulement de garder sur lui son transport de la maison à son lieu de travail car il serait rappelé par son patron sous peu.
Le jour suivant, M Yapi prenait sa douche matinale quand il reçu l'appel de son ancien patron. Ce dernier lui demandait  de reprendre le service immédiatement car il y avait eu une erreur à son sujet. A son arrivée, sa surprise fut encore plus grande car il fut intégré à un poste supérieur et mieux rémunéré que le premier poste qu’il avait occupé auparavant. Le dimanche suivant, M Yapi rendit témoignage à l’église. Les jours suivants il ne manquait plus aucun programme du pasteur Yobo. Il passait même ses week-ends entièrement à l’église, aidant son pasteur à préparer le culte du dimanche. 
A la fin du mois qui a suivi, M Yapi offrit comme cadeau au pasteur Yobo une voiture quatre fois quatre. Ce témoignage circula parmi la population dans ce grand quartier. Les parents, amis et connaissances qui avaient connu M Yapi avant sa réintégration dans la société, prirent d’assaut l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu. Ils devinrent tous des fidèles du pasteur Yobo, le faiseur de miracles. ET M Yapi comptait parmi les plus fidèles de l’église. Il devint très rapidement Diacre et membre du conseil de l’église. Par la suite, après seulement 2 mois dans le nouveau temple, le nombre de fidèles doubla. Et la renommée du pasteur Yobo dans le pays s’accroissait toujours. Il ne  prêchait plus seulement pour son église. Il était invité par ses compères qui au début de son ministère le critiquaient. Il avait des invitations aussi hors du pays. A cause de ces multiples voyages et sa célébrité, le Pasteur Yobo se vit délivrer un passeport diplomatique. On ne l’appelait plus Pasteur Yobo mais plutôt Le Pasteur des Nations. Un homme de Dieu international.

Fiers de leur pasteur, les fidèles s’organisèrent pour lui acheter une maison dans le quartier huppé de la capitale. Un duplex de 8 pièces tout équipé fût acquis pour le pasteur Yobo au quartier  Ambassadeurs, un quartier où résidaient les grands du pays.
Le pasteur Yobo était maintenant le voisin de plusieurs personnalités du pays. Il côtoyait des ministres du gouvernement, des ambassadeurs, des chefs de grandes entreprises. Dans son garage, il y avait, en plus de la 4x4 offerte par M Yapi, une autre voiture de luxe. Il ne s’habillait plus en chemise sahélienne comme il le faisait au début. C’était le temps des costumes et chaussures de marque. Depuis qu'il avait aménagé dans sa nouvelle maison, Pasteur Yobo était toujours tiré à quatre épingles.

Des ministres parmi ses voisins n’hésitaient plus à venir prier dans son église. Souvent c’était des cortèges qui parcouraient la ville avant d’arriver à l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu.
La vie du pasteur Yobo était encore plus belle. Non seulement, il avait la promesse du paradis céleste de Dieu. Mais pour l’instant il savourait les richesses terrestres. Ses fidèles étaient de plus en plus fiers de lui.

Trois mois après son déménagement, le pasteur Yobo eu une autre vision. Il décida de la partager avec ses conseillers. Le dimanche suivant il rassembla ces conseillés parmi lesquels le Diacre Yapi. Il  leur annonça que Dieu lui avait parlé et souhaitait qu’ils déménagent encore l’église. Cette fois-ci dans le quartier Ambassadeurs. Il sollicitait encore une autre offrande des fidèles.
Idée ne fut pas l’unanimité. Un groupe disait que Dieu n’avait pas parlé au pasteur Yobo mais qu’il était plutôt guidé par l’orgueil. Or selon eux comme il est écrit dans la Bible " l’orgueil précède la chute". Pour eux, déménager l’église conduirait cette fois ci à sa chute ». Par contre, l’autre groupe, plus restreint, disait que Dieu avait parlé à leur pasteur. Et il fallait mieux obéir à Dieu qu'aux hommes. Que pouvait l’homme devant un message divin. Ils s’appuyèrent sur le fait que Dieu aimait autant les riches que les pauvres. Le responsable Yapi qui était devenu un des membres influents de l’église faisait partie de ce groupe. Le Diacre Yapi ajouta même que cela ne coûtait rien de lancer l’opération et attendre le résultat avant de juger la vision. « L’opération ne nécessite pas moins d’une trentaine de millions. Si Dieu est avec nous, nous obtiendrons cet argent dès la première journée ? Sinon nous abandonnons» avait-il conclut.
La discussion ne dura pas plus. L’Eglise des Peuples Secourus par Dieu serait délocalisée au quartier des Ambassadeurs.
Le troisième dimanche qui suivit cette réunion, ils organisèrent un appel de fond. Le montant recueilli était au delà de toute attente à la grande joie de M Yapi. Les caissiers comptèrent ce jour là des billets comme jamais ils n’avaient compté auparavant dans cette église. 95 millions. Le ministre de la construction qui  était voisin au Pasteur Yobo lui promit un terrain de 1000M² au quartier des Ambassades pour bâtir le temple de Dieu. Le ministre des infrastructures qui venait lui aussi prié dans l’église du pasteur Yobo, promit du matériel qu’il ferait venir spécialement de l’Italie pour soutenir la construction du temple de Dieu.
L’homme de Dieu était satisfait et son conseil ecclésiastique aussi. Mais le groupe qui était contre un nouveau déménagement ne fut pas convaincu pour autant. Ils décidèrent de ne pas s’impliquer dans cette œuvre.
A côté d’eux, le groupe du responsable Yapi glorifiait Dieu chaque jour. L’Eglise des Peuples Secourus par Dieu, une petite église née dans un quartier précaire. La voici au milieu des grandes.
Effectivement, seulement 2 mois suffirent pour bâtir le nouveau temple et l’équiper entièrement. Quinze jours plus tard, le déménagement était terminé. L’inauguration du nouveau temple était prévu un samedi. La publicité dans les médias avait porté son fruit.
Le jour de l’inauguration, plusieurs autorités gouvernementales étaient présentes. Le premier ministre et la première dame étaient les invités d’honneur de cette cérémonie. Les chrétiens et non chrétiens, venus de tous les quartiers de la capitale, avaient envahis le quartier Ambassadeurs. Ceux qui étaient à l’intérieur du pays et qui avaient entendu parler de l’Eglise des  Peuples Secourus par Dieu avaient fait le déplacement la veille. D’autres encore étaient venus d’Europe surtout de la France. Le Pasteur Yobo avait été pour beaucoup d’entre eux à la base de la réussite de leur projet de voyage. Des pasteurs avaient encouragé leurs membres à se rendre à la cérémonie d’inauguration. Il y eut plusieurs dizaines de convois d’églises.
En fait, personne ne voulait être à l’écart. Chacun voulait être l’ami de ce pasteur qui déplace le premier Ministre et la Première Dame du pays. La foule était si nombreuse que le temple refusa du monde. La cérémonie dura toute l’après midi ce samedi. Il y eut plusieurs témoignages des bienfaits de Dieu. Des hommes, des femmes et des jeunes de tout âge racontèrent en public ce que Dieu avait fait dans leur vie par la simple prière du pasteur Yobo. Tout le monde attendait ce jour là impatiemment la prédication du Pasteur Yobo. Ce fut une courte prédication de dix minutes. La prière qui en suivit fut elle aussi très courte afin de laisser toute la place au discours de l’invité d’honneur, la première dame qui souhaitait ne plus rester pour longtemps. Après la prière, la première dame tint un discours élogieux à l’égard du pasteur Yobo pendant plus de quarante cinq minutes. Après elle, le premier ministre fit aussi un discours qui dura encore quarante minutes. Il cita le pasteur Yobo comme un exemple dans le pays. Désormais, tous étaient plus que convaincus de la vocation de cet homme, du pasteur des nations, le pasteur internationale. Le pasteur Yobo.

A la fin de la cérémonie, la première dame invita l’homme de Dieu à devenir le pasteur de la famille présidentielle. Le Pasteur Yobo en fut très honoré. Lui, simple pasteur de l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu. Le voilà devenu le pasteur du couple présidentiel du pays. Dieu avait vraiment un plan pour chaque homme. Dieu avait aussi un plan pour lui.
Dans ses nouveaux habits, le Pasteur de la famille présidentielle, tenait chaque semaine, au palais présidentiel une séance de prière spéciale à l’attention des membres du gouvernement. A côté de cela, il arrivait que la première dame demande des séances de prières spéciales au pasteur Yobo. En générale, il s'agissait de prières contre les sorciers de son village. Ou encore, des prières  contre les adversaires politiques de son mari, le président de la république. Les appels et les sollicitations de la première dame ne laissaient plus le temps au pasteur Yobo pour ses fidèles. Les membres de l’église des Peuples secourus par Dieu avaient commencé à murmurer. Mais le pasteur pouvait compter sur le Responsable Yapi. Ce dernier encourageait toujours les fidèles de l’église et les exhortait à soutenir leur pasteur dont le ministère devenait important dans le pays et dans le monde. Il leur disait qu’il devait voir cela comme une source de bénédiction pour l’Eglise et donc par ricochet, pour eux-mêmes. Le couple présidentiel appréciait beaucoup les services de l’homme de Dieu. Le président, la première dame ainsi que leurs enfants étaient assidus aux séances de prière avec le Pasteur Yobo.

Pour la première fois depuis 25 ans, on devrait organiser les élections dans le pays. La population était visiblement excitée de voir enfin partir cet ancien et vieux président. Mais le président ne voulait pas abandonner son fauteuil. Il ne comptait plus sur les hommes parce qu’il n’avait plus le soutien des siens. Plusieurs de ces ministres étaient corrompus et vendus d’avance. Le président voyait aussi qu’il n’avait plus le soutien infaillible de la communauté internationale comme dans certains pays. Dans ces circonstances, Dieu était le dernier rempart  Et il savait qu’il pouvait compter sur le pasteur de l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu. Lui-même faisant partie des personnes à secourir.
Le Président demanda à multiplier les séances de prière avec le pasteur Yobo à la maison. Il promit même au Pasteur Yobo le poste de Ministre des Cultes au futur gouvernement s’il gagnait les élections. D’une seule séance de prière en semaine, ils passèrent à trois séances. Maintenant le président était reconnu pour un chrétien fervent. Quelques fois les séances de prières à la maison présidentielle étaient diffusées en directe à la télévision nationale.
Les opposants au régime du président l’accusaient de ne pas s’occuper des problèmes du peuple qui vivait dans une paupérisation avancée.
De son côté, le Pasteur Yobo donnait de son va-tout pour que Dieu exauce le Président.
Entre-temps, il y avait des rumeurs de coups d’états dans la ville. Presque tous les jours, des journaux en faveur du régime titraient : « un coup d’état se prépare contre le régime en place » ; ou « Il n’y a jamais de fumée sans feu : Voici les preuves du coup d’état » ; « On veut déstabiliser le pays par un coup d’état ». 
Ces informations ne permettaient plus au Président de la république de se déplacer librement. Il ne se rendait donc plus au temple de l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu. Les dimanches, c’est le pasteur Yobo qui se déplaçait au palais présidentiel. Le pasteur  officiait donc le matin dans son temple et l’après midi, il officiait à la maison présidentielle.
Dans ces circonstances, plusieurs membres du gouvernement parmi ceux qui priaient dans l’église du Pasteur Yobo, se joignirent au culte du soir à la maison présidentielle. Les continuelles absences et indisponibilités du pasteur Yobo avait fini par décourager plusieurs membres de l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu. Ils étaient fatigués d’entendre le Responsable Yapi qui ne leur était d’aucune utilité pour le changement de leur situation sociale. En fait, le responsable Yapi n’avait pas le charisme du pasteur Yobo. Petit à petit, l’église qui avaient été bâtie et inaugurée en grande pompe se vidait. Le Pst Yobo ne s’en rendait pas compte. Il était aveuglé par son service présidentiel et la perspective de devenir le ministre du culte du futur gouvernement.
Pourtant, cette année là, il n’y eut pas de coup d’état contrairement  à ce qu'annonçaient plusieurs médias internationaux. Les élections furent organisées dans le calme. Elles furent transparentes, démocratiques et libres pour une fois en Afrique  Et le Président, fidèle du pasteur Yobo perdit les élections devant son farouche opposant. Le Pasteur Yobo, ne fut pas Ministre de Culte. Il n’y avait plus de ministres autour de lui. Tous ses amis de l’ancien régime avaient été évincés. Ils ne s’intéressaient plus à Dieu. Ni le Pasteur Yobo, ni l’église des Peuples Secourus par Dieu n’avaient permis que ces ministres soient sauvés dans leur détresse. Ils disaient que Dieu ne les avaient pas secourus. Donc ils ne feraient plus partie de l'Eglise des Peuples Secourus par Dieu du Pasteur Yobo.

Quelques semaines après sa cuisante défaite, l’ex-président qui avait déjà fait 25 ans au pouvoir mourut et sa femme aussi. On ne savait pas au juste de quoi ils étaient morts. Tout ce qu’on savait c’était qu’ils étaient morts dans des conditions non élucidées dans un pays voisin.

Lorsque les partisans de l’ancien régime apprirent la nouvelle du décès de l’ex président, ils prirent peur en pensant à une justice des vainqueurs. Plusieurs se réfugièrent dans les pays voisins. Les hauts dignitaires de l’ancien régime qui fréquentaient l’église du pasteur Yobo s’enfuirent aussi. Il n’y avait donc plus d’hommes puissants qui assistaient aux cultes du pasteur. Les fidèles qui ne résidaient pas dans le quartier des Ambassadeurs n’effectuaient plus le déplacement par peur d’être vu comme des partisans de l’ancien régime. Le pasteur Yobo s’était retrouvé maintenant seul avec une petite poignée de fidèles. Les dîmes et les offrandes des dimanches et des réunions en semaine n’atteignaient pas soixante FCFA par mois. Pourtant les charges administratives du nouveau temple étaient très élevées. Au début, le pasteur Yobo comptait sur ses propres économies et l’appui financier du responsable Yapi, son fidèle disciple. Malheureusement, lui aussi avait perdu son emploi. Le directeur général de la société où il était employé venait d’être remercié par le nouveau conseil d’administration mis en place par les nouveaux dignitaires. Le responsable Yapi n’avait pas échappé aux vents de licenciement qui s'en suivit. Pour finir, il ne restait que les propres économies du pasteur Yobo pour relancer les activités de l’église.
Avec la poignée de fidèles de l’église, ils firent un jeûne de sept jours sans manger ni boire de jour comme de nuit. Au sixième jour, le pasteur Yobo eu une vision. Le septième jour il partagea cela avec ces frères en Christ parmi lesquels le fidèle M Yapi. Ils devaient utiliser toutes ses économies pour faire une grande croisade d’évangélisation dans le nouveau temple sis au quartier des Ambassadeurs. Tous adhérèrent à l’idée de cette grande croisade. Dieu avait encore parlé et il n’y avait pas de raison de ne pas obéir.  
Le pasteur Yobo vendit tous ses biens. Avec ses économies et les revenus de ces ventes, il s’engagea dans l’organisation de cette croisade. Il mobilisa son équipe. Des affichent et des prospectus furent confectionnés et collés dans toute la ville. Des spots télé furent diffusés. Des passages à la télé ainsi qu’à la radio furent organisés par le pasteur lui-même. Il avait utilisé toutes ses économies. Durant toute la semaine on ne parlait que de la croisade du pasteur Yobo dans tous les médias. chaque jours, les membres du comité recevaient des appels téléphoniques de personnes désirant savoir s'il s'agissait bien de l'Eglise du Pasteur Yobo. 

Le jour de la croisade, c’était un samedi, une grande pluie s'abattit sur la ville du matin jusqu'à l'heure de la croisade. La salle était vide. Personne n’avait effectué le déplacement de la croisade. Le pasteur Yobo ne s’est retrouvé qu’avec son équipe d’organisation. Il ne se découragea pas pour autant. Il motiva ses compagnons à sortir pour prêcher hors de l’église de seize heures à vingt deux heures pour annoncer la bonne nouvelle, l’évangile de Jésus-Christ, aux âmes perdues. Il était certain que Dieu lui avait parlé. Ce jour là, le responsable Yapi et les autres se mirent à prêcher dans les rues du quartier des Ambassadeurs. A l'aide de mégaphones, ils annoncèrent la parole de Dieu jusque dans la soirée. Vers vingt deux heures trente minutes, leurs cris finirent par agacer les habitants du quartier. Ceux-ci leur demandaient de cesser leur les bruits. Mais les disciples du Pasteur continuaient de plus belle. Ils crièrent encore plus fort.  Dans leurs paroles qu’on pouvait entendre à plus de vingt cinq mètres, ils traitaient ouvertement les habitants de païens, de démons, de possédés, d’anti-christ. Et puisqu’ils continuaient à s’égosiller malgré les interpellations des habitants de cette cité résidentielle, ceux-ci, ne pouvant plus les supporter furent remplis de colère. On entendit crier un des jeunes de la cité : « puisque nous sommes des démons, nous allons leur montrer comment nous combattons le Christ ». Aussitôt, une trentaine de jeunes, tenant des chicottes se ruèrent  sur les disciples du pasteur Yobo. Devant cette sortie inattendue de la population, chacun des prédicateurs courut vers l’Eglise des Peuples Secourus par Dieu où se trouvait le Pasteur Yobo. Ils détalèrent en laissant derrière eux mégaphones, sandales, souliers, bibles et autres. Les jeunes et adultes du quartier des Ambassades ne firent pas de cadeau aux chrétiens de l’église des Peuples Secourus par Dieu. Ils les pourchassèrent jusqu’à leur temple et les y enfermèrent avec leur Pasteur. Cette nuit là, le pasteur Yobo, le Responsable Yapi et la poignée de fidèles furent bastonnés jusqu'au matin par la population déchaînée et enragée du quartier Ambassadeurs. Au levé du jour, le Pst Yobo et ses fidèles avaient les yeux enflés, le corps blessé, les lèvres déchirées, les vêtements décousus. Ils pleuraient et invoquaient le secours de Dieu. Les douleurs de leurs chairs finirent par les disperser et les séparer les uns des autres. L’église fut fermée au quartier des Ambassadeurs le dimanche suivant. Elle ne fut plus ouverte jusqu'aujourd'hui. 

La nouvelle de cette nuit parcourue toute la capitale jusque dans le quartier précaire où le Pasteur Yobo avait commencé son ministère pastorale. Un ancien membre de l’église, qui connaissait bien l'Eglise des Peuples Secourus par Dieu, recueillit le Pasteur Yobo dans sa modeste maison en bois de 2 pièces. C'est là que le Pasteur Yobo demeure jusqu'à présent. Il ne sait toujours pas s'il doit reprendre le ministère pastoral ou s'il doit s'adonner à d'autres activités lucratives. En entendant, il dirige la cellule de prière qui se tient dans la famille de ce fidèle. 

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